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 ils ont marqué l'histoiresuite2....

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DARDY
le coran et la science
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DARDY


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Quelques infos pour me connaître : étudiante souhaitant le meilleur pour sa religion et son pays
Date d'inscription : 25/11/2005

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MessageSujet: ils ont marqué l'histoiresuite2....   ils ont marqué l'histoiresuite2.... EmptyJeu 16 Mar - 13:22

Une œuvre encyclopédique
On ne peut donner ici qu’une idée de son immense production. La bibliographie minutieuse établie par G. C. Anawati (Le Caire) comporte deux cent soixante-seize titres. Celle, non moins minutieuse, établie par le professeur Yahya Mahdavi (Téhéran) comporte deux cent quarante-deux titres. Sans que nous puissions rendre compte ici des raisons de leur différence, les deux chiffres suffisent à indiquer que l’œuvre totale d’Avicenne correspond à un labeur écrasant. Certains ouvrages sont des monuments, comme le Shifa’ , le Canon ; d’autres sont des ouvrages de dimension normale (le Kitab al-Nadjat ou Livre de la délivrance de l’âme ), voire de simples opuscules. Avicenne a écrit principalement en arabe classique, qui était pour lui ce que fut pour nous le latin. Mais il a écrit également en persan, sa langue maternelle. Sa production couvre tout le champ du savoir, tel qu’il typifie la culture islamique de l’époque: logique, linguistique, poésie; physique, psychologie, médecine, chimie; mathématiques, musique, astronomie; morale et économie; métaphysique: les ilahiyat (la philosophia divinalis ). Relevons enfin particulièrement les ouvrages sur la mystique (parmi lesquels les récits symboliques que l’on rappellera plus loin), les commentaires sur plusieurs sourates du Coran, auxquels on rattachera le traité sur le sens ésotérique de la prière (Asrar al-Salat ). Il faut encore mentionner une importante correspondance avec quelques philosophes contemporains. Le dessein personnel du philosophe devait trouver son achèvement dans ce qu’il désigne à maintes reprises comme devant être une “philosophie orientale” (hikmat mashriqiya ). Nous mentionnerons plus loin ce qu’il en est de cette “philosophie orientale”, disparue lors du sac d’Ispahan (1034) avec le Kitab al-Insaf (Livre de l’arbitrage équitable ), monumental ouvrage répondant à vingt-huit mille questions et dont il ne subsiste que quelques fragments, Avicenne n’ayant eu ni le temps ni la force de le refaire.

2. La métaphysique
Pour le très bref aperçu qui s’impose ici, le centre de perspective à choisir est la théorie avicennienne de la connaissance, solidaire de toute sa métaphysique, parce que cette noétique se présente comme l’aspect gnoséologique d’une théorie des Intelligences qui est une angélologie, et que cette angélologie fonde la cosmologie, en même temps qu’elle situe l’anthropologie.

L’exister : un accident nécessaire
La métaphysique d’Avicenne est une métaphysique des essences , et cette métaphysique des essences subsistera dans la tradition de l’avicennisme iranien jusqu’à la grande réforme opérée par Molla Sadra Shirazi (1640), personnalité dominante de l’école d’Ispahan, qui substituera une métaphysique de l’exister à cette métaphysique des essences. L’essence, ou la nature, ou la quiddité, est ce qu’elle est, absolument, inconditionnellement. Cela veut dire qu’elle est neutre et indifférente à l’égard de la condition négative qui doit en maintenir à l’écart tout ce qui peut l’empêcher d’être une idée générale, un des “universaux”, de même qu’elle est neutre et indifférente à l’égard de la condition positive déterminant ce qu’il faut lui ajouter pour qu’elle soit réalisée dans un individu particulier. Or, parmi ces essences qui, de par elles-mêmes, n’impliquent ni n’excluent l’universalité ni la singularité et qui, indifférentes et supérieures à l’une et à l’autre, sont l’objet propre de la métaphysique, il en est une privilégiée. De par la nécessité de son contenu propre, chaque essence est ce qu’elle est, c’est-à-dire est quelque chose. Qu’en est-il de ce quelque chose, de cet être quelque chose? La question est telle que, d’emblée, la notion d’être se dédouble en être nécessaire et être possible. Possible est chaque essence, ce quelque chose qu’elle est, mais qui n’existera jamais si quelque cause ne la rend nécessaire. L’exister est alors un accident se surajoutant à l’essence, mais un accident “nécessaire”, dès lors que la cause totale en étant donnée, cette cause rend nécessaire cette existence.

La Première Intelligence
L’univers avicennien ne comporte pas ce que nous appelons la “contingence”, dès lors que le possible est fait existant. Si quelque possible est actualisé dans l’être, c’est que son existence est rendue nécessaire en raison de sa cause, laquelle à son tour est nécessitée par sa propre cause. Il s’ensuit que l’idée orthodoxe de “création” subit ici une altération radicale. Il ne peut s’agir de quelque chose comme d’un coup d’État survenu en la Volonté divine dans la “prééternité”; c’est une nécessité intradivine qui conduit de l’Être pur au premier être fait existant. La Création consiste dans l’acte même de la pensée divine se pensant elle-même, et cette connaissance que l’Être divin a éternellement de soi-même n’est autre que la Première Émanation, le Premier Nouv ou Première Intelligence (‘Aql awwal ). Cet effet initial, nécessaire et unique, de l’énergie créatrice identique à la pensée divine, assure la médiation de l’Un au Multiple, en posant soi-même le principe auquel il satisfait: “De l’Un ne peut procéder que l’Un”.

À partir de cette Première Intelligence médiatrice, la pluralité de l’être va procéder d’une série d’actes de pensée ou de contemplation qui font en quelque sorte de la cosmologie une phénoménologie de la conscience angélique. La Première Intelligence contemple son Principe, et de cet acte de penser procède la Deuxième Intelligence. Elle se contemple elle-même en tant que sa relation avec son Principe rend nécessaire sa propre existence , et de cette pensée par laquelle elle se pense elle-même comme nécessaire par son Principe procède la Première Âme, Motrice du premier ciel ou Sphère des Sphères qui englobe toutes les autres. Enfin elle se contemple elle-même, dans ce qu’elle est par elle-même, c’est-à-dire qu’elle contemple son essence en tant que possible dont l’existence n’est rendue nécessaire que par son Principe, et de cette pensée impliquant son virtuel non-être procède la matière de la Sphère des Sphères, c’est-à-dire la matière céleste encore toute subtile, une quinta essentia par rapport aux quatre éléments sublunaires. Tandis que la “dimension” de son exister est sa dimension de lumière, la “dimension” de sa propre essence représente donc en quelque sorte sa dimension d’ombre ; le ciel qui en procède marque ainsi la distance qui sépare l’Âme motrice de ce ciel et l’Intelligence dont elle émane; c’est cette distance que vise à combler le désir qui entraîne cette Âme vers cette Intelligence, tandis que cette Âme entraîne ainsi son propre ciel dans le mouvement de son désir. Cette triple contemplation instauratrice des premiers degrés de l’être se répète d’Intelligence en Intelligence, jusqu’à ce que soit complète la double hiérarchie : hiérarchie supérieure des Dix Intelligences, celles qu’Avicenne désigne comme les Chérubins (Karubiyun, Kerubim ) ou Anges sacro-saints (mala’ikat al-quds, angeli intellectuales ), et hiérarchie inférieure des Âmes célestes, celles qu’il désigne comme Anges de la magnificence (mala’ikat a-l‘izza, angeli coelestes ). Ces Âmes célestes, motrices des cieux, n’ont point les facultés de perception sensible; en revanche, elles possèdent l’imaginative à l’état pur, exempte de la servitude et du trouble des sens. Elles sont le “lieu” de l’imaginal entre l’intelligible pur et le sensible (c’est pourquoi leur disparition, dans le système d’Averroès, sera si lourde de conséquences, quand il s’agira d’interpréter les événements visionnaires, les récits prophétiques, l’eschatologie). Il n’est point exclu qu’il faille compter autant d’Intelligences et d’Âmes motrices que peut en requérir soit la physique céleste péripatéticienne homocentrique, soit la physique céleste de Ptolémée, comportant pour chaque ciel autant de Sphères qu’en impliquaient les mouvements dans lesquels il apparaissait nécessaire de décomposer le mouvement d’ensemble de l’astre (système des excentriques et des épicycles). Il reste que la hiérarchie des Dix correspond aux Sphères majeures ou englobantes (Sphère des Sphères, Sphère des Fixes, sept Sphères planétaires, Sphère sublunaire). Chaque fois, c’est le désir de l’Âme aspirant à l’Intelligence dont elle émane qui communique à chacun des cieux leur mouvement propre. Les révolutions cosmiques auxquelles prend origine tout mouvement sont donc l’effet d’une aspiration d’amour toujours inassouvie.

Intelligence et illumination
La dernière des Dix Intelligences est celle qui est désignée comme l’“Intelligence agente” ou active (‘Aql fa ‘‘al, Intelligentia agens ); les philosophes avicenniens l’identifient avec l’Esprit-Saint que le Coran, de son côté, identifie avec Gabriel, l’Ange de la révélation. De cette dernière Intelligence émanent non plus une Intelligence unique et une Âme unique; mais, trop éloignée du Principe, sa vertu émanatrice se fragmente en la multitude des âmes humaines. Elle est celle dont l’“illumination” (ishraq ) projette les idées ou formes de connaissance sur les âmes qui ont acquis l’habitus de se tourner vers elle. Il importe en effet de noter que, selon la doctrine avicennienne, l’intellect humain n’a ni la tâche ni le pouvoir d’abstraire les formes, les Idées; il ne peut que se préparer, se rendre apte, par la perception sensible, à recevoir l’illumination de l’Ange projetant sur lui la forme intelligible. Cette illumination est donc une émanation venant de l’Ange ; elle n’est pas une abstraction accomplie par l’intellect humain; elle est eo ipso présence de l’Ange (faute de comprendre cette relation, on ne peut saisir la relation entre cette gnoséologie et l’expérience mystique).

Aussi bien, l’intellect humain a-t-il une structure analogue à celle de l’Ange (la double “dimension” analysée plus haut). Cependant, la différenciation avicennienne entre intellect contemplatif ou théorétique et intellect pratique n’est pas exactement celle qui, chez Aristote, est désignée par ces mêmes noms. L’intellect est tout simplement l’anima , l’âme pensante. L’intellect pratique (qui est appelé aussi “intellect actif”), c’est l’âme pensante dans sa fonction pratique et active, c’est-à-dire en tant qu’occupée à gouverner le corps et ses puissances vitales. Il est envers l’intellect contemplatif dans le même rapport que l’Âme céleste, motrice de son ciel, envers l’Intelligence dont elle émane, ou dans le même rapport que l’intellect contemplatif lui-même envers l’Intelligence agente (c’est ce rapport que mettent en œuvre les récits symboliques de Hayy ibn Yaqzan et de Salaman et Absal). Quant à l’intellect contemplatif, il comporte quatre degrés: un premier degré où l’intellect, nu et vide, est dans le même état qu’une matière en puissance à l’égard de toute forme; ensuite, il entre déjà en acte par les sensations et les images; il entre tout à fait en acte, devient intellect “acquis”, dès qu’il se tourne vers l’Intelligence agente séparée pour en recevoir les formes intelligibles correspondant à ses images sensibles; enfin, à force de répéter cette “conversion” vers l’Ange, cela devient chez lui un état “habituel” (‘aql bi-l-malaka, intellectus in habitu) . La relation n’est donc pas une relation purement “intellectuelle” au sens moderne du mot. L’Ange de la connaissance est aussi en un sens éminent l’Ange de la révélation dans chaque acte de connaissance qu’il opère dans l’âme, lorsque celle-ci est devenue apte à recevoir l’irradiation d’une Forme intelligible. La connaissance de soi impliquera la connaissance du “Donateur” de ces formes. On a pu retrouver, dans l’analyse avicennienne d’une essence se pensant elle-même sans référence à son corps, une préfiguration du Cogito . Il conviendrait d’ajouter que ce Cogito implique un Cogitor . Au-dessus des quatre états qui viennent d’être indiqués, il y a encore un état supérieur d’intimité de l’intellect contemplatif avec l’Ange, qui est l’Intelligence agente et l’Ange de la révélation. Cet état supérieur est désigné comme l’intellect saint (‘aql qudsi ). Son cas privilégié et son sommet, c’est l’esprit de prophétie, la révélation communiquée aux prophètes. Le schéma de la gnoséologie avicennienne fait ainsi sa place à une “philosophie prophétique”, telle qu’en avaient besoin penseurs et spirituels appartenant à la religion prophétique qu’est l’islam.
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DARDY
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MessageSujet: Re: ils ont marqué l'histoiresuite2....   ils ont marqué l'histoiresuite2.... EmptyJeu 16 Mar - 13:23

suite3
L’immortalité de l’âme
Tout cela suffit à faire entrevoir que, sur la question du Nouv poictikov qui a départagé dès l’origine les interprètes d’Aristote, Avicenne, à la suite d’al-Farabi, a opté (contrairement à Themistius et à saint Thomas d’Aquin) pour une Intelligence séparée et extrinsèque à l’intellect humain, sans l’identifier pour autant au concept de Dieu (comme Alexandre d’Aphrodise ou comme les augustiniens). Farabi et Avicenne ont fait de cette Intelligence un être du Plérôme suprême auquel l’être humain se trouve rattaché directement et précisément par elle et c’est là l’originalité “gnostique” de nos philosophes. D’autre part, en puissant contraste avec la doctrine averroïste de l’Intelligence, la doctrine avicennienne considère chaque acte de conjonction de l’âme humaine avec l’Intelligence agente comme marquant un degré de croissance de l’individualité spirituelle de l’homme. Dire que l’Intelligence agente est unique pour le genre humain, ce n’est pas dire pour autant qu’elle est seule immortelle de plein droit. Car la capacité de surexistence, d’immortalité, c’est cela même qu’elle confère à tous ceux chez qui l’aptitude à recevoir son illumination est devenue un état habituel. Ni Farabi, ni Avicenne, ni Sohrawardi ne pouvaient se satisfaire de l’idée péripatéticienne de l’âme comme “forme” d’un corps, “perfection (entéléchie) d’un corps organique ayant la vie en puissance”. Cette “information” ou animation d’un corps n’est que l’une des fonctions de l’âme; ce n’est pas même la principale. L’anthropologie de nos philosophes est néo-platonicienne.

3. La “philosophie orientale”
Cette brève esquisse permet de pressentir comment le projet de “philosophie orientale” s’articulait à l’ensemble de l’œuvre ou, pour mieux dire, était la clef de cet ensemble. En Occident latin, il semble que seul Roger Bacon, qui avait lu de très près les traductions latines, s’en soit sérieusement avisé (Opus majus , III, 46: “...secunda philosophia Avicennae quam vocant orientalem , quae traditur secundum puritatem philosophiae in se , nec timet ictus contradicentium lancearum ”). Lui fait écho, parmi beaucoup d’autres en Iran, le monumental commentaire produit par Sayyed Ahmad ‘Alawi (élève et gendre de Mir Damad, le grand maître de philosophie et de théologie à Ispahan, 1631) sous le titre Clef du Shifa’ (Miftah al-Shifa’ ). Le commentateur justifie son titre en se référant expressément aux quelques lignes par lesquelles Avicenne, dès le début du Shifa’ , renvoie à sa “philosophie orientale” comme expression de sa vraie doctrine personnelle.

Orient et Occident
Malheureusement, on l’a rappelé ci-dessus, il ne subsiste de cette “philosophie orientale” que des esquisses, fragments et allusions qu’éclaire, il est vrai, leur contexte. Parce que l’un d’eux (de Slane) avait commis une erreur de vocalisation, les orientalistes ont longtemps débattu sur la question de savoir ce qu’il convenait d’entendre par cette “philosophie orientale”. Nallino passa pour avoir tranché la question (en 1925), en montrant qu’il ne s’agissait pas de philosophie “illuminative”, mais de philosophie “orientale”; bref, qu’il convenait de lire mashriqiya et non pas mushriqiya. C’était un peu enfoncer une porte ouverte, car en Orient, en particulier chez les philosophes se succédant de génération en génération en Iran, jamais personne ne s’était avisé de lire autrement que mashriqiya. Malheureusement, cette tradition fut longtemps ignorée en Occident. Malheureusement aussi, Nallino était animé d’une inexplicable phobie à l’égard des néo-platoniciens. Son propos tendait, en premier et dernier lieu, à dissocier le projet “oriental” avicennien de toute compromission avec la philosophie dite “illuminative” de Sohrawardi. C’était là perdre de vue que l’un et l’autre, Avicenne et Sohrawardi se servent du même terme ishraq (illumination de l’astre à son lever, à son orient ); c’était oublier que Sohrawardi, chef de file des Ishraqiyun , n’avait lui-même voulu restaurer rien d’autre qu’une philosophie ou une théosophie “orientale” (les deux termes ishraqiya et mashriqiya sont pour lui équivalents). Ce qu’il y a de commun et de différent entre Avicenne et Sohrawardi, c’est ce qu’il y a de commun et ce par quoi diffèrent deux philosophes dont l’un reprend le projet de l’autre parce qu’il estime que son prédécesseur n’a pas pu le mener à bien ou n’était pas en mesure de le réaliser. Ainsi s’exprime Sohrawardi à l’égard d’Avicenne, parce que celui-ci n’avait pas atteint, selon lui, jusqu’aux sources “orientales” premières. On s’est donné beaucoup de peine en Occident pour localiser géographiquement et ethniquement les “orientaux” auxquels pouvait penser Avicenne, lorsqu’il parle de “philosophie orientale”. Aucune solution proposée sur ce plan n’a, semble-t-il, été convaincante. En revanche, il y a une tradition constante en théosophie et mystique islamiques, selon laquelle l’“Orient” (mashriq ) désigne le monde de la lumière, le monde des Intelligences, les univers angéliques, tandis que l’“Occident” (maghrib ) réfère au monde des ténèbres et de la matière sublunaire où “déclinent” les âmes. Or, cette façon de comprendre l’Orient est parfaitement explicite non seulement chez Sohrawardi mais chez Avicenne lui-même, dans son récit symbolique de Hayy ibn Yaqzan.

Le voyage spirituel vers l’Orient mystique
Nous dirons seulement ici que, dans l’état des textes, l’idée la plus précise que l’on puisse se faire de cette “philosophie orientale” d’Avicenne est à chercher, d’une part, dans ce qui a survécu de ses Notes sur la Théologie dite d’Aristote (théologie qui est en fait une paraphrase, en arabe, des dernières Ennéades de Plotin). Ce n’est pas un hasard si toutes les références qu’y donne Aristote à sa “philosophie orientale” (une demi-douzaine) se rapportent au devenir posthume de l’âme, aux conditions de son retour dans le monde qui lui est propre, le monde qui dans les Récits symboliques est précisément désigné comme l’“Orient”.

D’autre part, cette idée de l’Orient au sens spirituel est à recueillir dans la trilogie de ces Récits mystiques où Avicenne a déposé le secret de son expérience personnelle, offrant ainsi le cas assez rare d’un philosophe prenant parfaitement conscience de lui-même et parvenant à configurer ses propres symboles. Les trois Récits ont pour thème le voyage spirituel vers un Orient mystique, introuvable sur nos cartes, mais dont l’idée émerge déjà dans les gnoses antérieures à Avicenne. Le Récit de Hayy ibn Yaqzan (dont Sohrawardi écrira intentionnellement la “suite”, dans son propre Récit de l’exil occidental ) débute par un prologue qui rappelle certains autres récits inspirés de l’hermétisme en Islam; il forme une invitation et une initiation au voyage mystique dont il décrit les étapes jusqu’à l’Orient, en compagnie de l’Ange illuminateur, l’Intelligence agente, dont la relation personnelle avec le philosophe s’individualise sous les traits du personnage de Hayy ibn Yaqzan (Vivens filius Vigilantis , Veilleur, cf. Les Egregoroï des livres d’Hénoch). Le Récit de l’oiseau effectue ce voyage aux péripéties dramatiques, jusqu’à l’Extrême-Orient. Sohrawardi le traduira en persan; il y en aura plus d’une imitation, l’ensemble formant un cycle qui trouvera son couronnement dans l’admirable épopée mystique persane de Faridoddin ‘Attar (XIIe s.). Le Récit de Salaman et Absal , c’est le drame des deux héros de la partie finale du Livre des directives et des remarques (Kitab al-Isharat wa-l-tanbihat ); ils typifient les deux intellects contemplatif et pratique (cf. supra ), et plus largement encore correspondent aux figures des documents hermétistes: Phôs- Lumière et Adam terrestre, Prométhée et Épiméthée, l’homme “célestiel” et l’homme de chair. Ce ne sont point là des allégories, mais des symboles (on confond trop souvent les deux termes). Il ne s’agit pas d’affabulations de vérités théoriques pouvant être aussi bien dites autrement. Ce qu’Avicenne essaye d’y configurer – son drame intime personnel, l’apprentissage de toute une vie – ne pouvait être dit autrement. Car le symbole est chiffre et silence; il dit et ne dit pas. Il n’est point expliqué une fois pour toutes; sa signification s’amplifie au fur et à mesure que chacun y lit le chiffre de sa propre transmutation.

Comprendre vraiment, c’est prier
À ce moment précis, la question se poserait de savoir si le philosophe Avicenne fut ou non un mystique. Il ne semble pas, en tout cas, que l’on soit en mesure de répondre à la question, si l’on commence par adopter le point de vue de quelque théologie dogmatique étrangère à l’avicennisme, voire étrangère au climat propre à l’Islam. En vertu de ses prémisses, semblable théologie pourra refuser à Avicenne et à ses confrères la qualification de “mystique”. Elle aura commis une pétition de principe et la question n’en continuera pas moins de se poser. C’est que le mot “mystique” peut aussi bien prendre des acceptions différentes, en passant d’une théologie à une autre. On observera qu’en Islam même, Avicenne est généralement classé, de plein droit, parmi les falasifat al-Islam , les philosophes de l’Islam, plutôt que parmi les spirituels, qu’il s’agisse des soufis ou qu’il s’agisse des ’urafa’ . Mais c’est qu’à le classer parmi ces derniers, rien ne laisserait entendre qu’il fut aussi un philosophe, tandis qu’en le classant, comme il se doit, parmi les philosophes, rien n’exclut qu’il ait eu aussi sa propre expérience mystique. Or, si l’on médite le Récit de l’oiseau et le personnage d’Absal, il semble impossible de nier que le philosophe Avicenne ait atteint une réalisation spirituelle personnelle nettement différenciée d’une philosophie purement théorique. En outre, sa doctrine de la conjonction (ittisal ) de l’âme avec l’Intelligence, Ange de la connaissance et de la révélation, est l’archétype auquel se réfère mainte explication de l’unio mystica , union essentielle sans confusion des personnes. Si l’on réfléchit sur la progression de l’âme, telle qu’elle s’exprime dans la doctrine avicennienne de l’intellect, on comprend qu’il soit vrai de dire qu’à son sommet tout acte de connaissance devient une prière. C’est ce que l’on ne doit jamais oublier pour juger de l’efficacité de la doctrine comme pédagogie spirituelle. Quant au secret de l’homme Avicenne, c’est, comme toujours en Islam, un secret entre lui et son Dieu. Il n’est point d’autorité humaine habilitée à porter sur lui un jugement.

4. Avicennisme latin et avicennisme iranien
Longue est l’“histoire” de l’Intelligence agente jusqu’en ce milieu des Fideli d’amore , autour de Dante, qui la saluaient comme Madonna Intelligenza . Et l’on peut dire que la figure et le rôle de l’Ange, Intelligence agente et Esprit-Saint, permettent de comprendre les destinées ultérieures de l’avicennisme en Occident latin d’une part, en Islam iranien d’autre part. Il y eut certes en Occident, au XIIe siècle et à l’orée du XIIIe, l’esquisse d’un avicennisme latin à l’état pur, dont il subsiste quelques textes. Cet avicennisme latin tendait à conserver intégralement la noétique avicennienne qui n’est qu’un aspect de la cosmologie, l’une et l’autre n’étant aussi bien qu’un aspect de l’angélologie. Mais cet authentique avicennisme latin n’a pas survécu. Il suffit, pour en comprendre les raisons, de se reporter aux sarcasmes de Guillaume d’Auvergne, évêque de Paris, qui s’exprime à l’égard de la hiérarchie des Intelligences et des Âmes un peu à la façon de Voltaire s’exprimant à l’égard du christianisme.
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suite4
Avicenne et Albert le Grand
En cherchant une autre direction dans laquelle fructifia l’avicennisme au cœur de la scolastique latine, on s’oriente, par le fait même, dans la direction où l’avicennisme exerça une nette influence, certes, mais finalement au prix d’une altération radicale. On relèvera, en premier lieu, l’intérêt des références à Avicenne chez Albert le Grand, dans ses œuvres minéralogiques. Maître Albert a lu dans la physique d’Avicenne qu’une certaine force est immanente à l’âme humaine, une force à laquelle sont soumises les choses et qui est capable de les transformer, surtout quand l’âme est portée à un grand excès d’amour ou de haine, ou à quelque chose de semblable (De mirabilibus mundi ). Plus précisément encore, il affirme, en se référant à Avicenne, que l’alchimie appartient à la magie, en ce sens qu’elle est fondée sur les forces occultes de la psyché humaine qui, elle, reçoit des virtutes coelestes l’impulsion à de telles opérations. L’alchimie comporterait ainsi une opération purement physique au niveau de l’analyse, purement psychique au niveau de la synthèse. C’est pourquoi, estime Albert le Grand, tant d’alchimistes ont échoué (De mineralibus , II, 1). Cette remarque est particulièrement frappante parce qu’il s’ensuit que l’alchimie n’est pas une forme archaïque de la chimie, mais une activité à la fois pratique et spirituelle. La référence à Avicenne suggère ici qu’il y aurait à rechercher tout au long de l’alchimie de langue latine les traces d’une influence avicennienne tantôt réelle quand il s’agit d’œuvres authentiques, tantôt purement nominale quand il s’agit d’apocryphes.

Quant à la doctrine de l’Intelligence, il est remarquable qu’Albert le Grand se réfère encore à Avicenne pour affirmer que tout le vrai que nous connaissons n’est connu de nous que par une inspiration de l’Esprit-Saint. En effet, posséder une science ne signifie rien d’autre, en termes avicenniens, que l’aptitude acquise à se tourner vers l’Intelligence agente pour en recevoir l’intelligible. On trouvera des thèses semblables chez Ulrich de Strasbourg, disciple d’Albert le Grand.

L’augustinisme avicennisant
Comme on le sait, l’œuvre d’Albert le Grand fut recouverte, pendant des siècles, par l’œuvre de son élève le plus célèbre, saint Thomas d’Aquin. Et précisément une grande part de l’activité de saint Thomas fut consacrée à la critique destructive d’une forme d’augustinisme qui conduisit Étienne Gilson à la découverte et à l’analyse mémorable du phénomène qu’il caractérisa comme “augustinisme avicennisant”.

Le docteur le plus représentatif en fut sans doute Roger Bacon, au XIIIe siècle. Cet “augustinisme avicennisant” obéit à la nécessité de “crever le plafond de l’univers avicennien” (Gilson) pour aller jusqu’à Dieu. Il transfère à Dieu “en personne” les perfections et la fonction illuminative de l’Intelligence agente. Un tel transfert n’était possible que si l’on perdait de vue les prémisses de l’avicennisme et si l’on consentait à une défiguration radicale. Tout ce qui faisait le lien nécessaire entre la cosmologie et la gnoséologie, la sotériologie et les hiérarchies célestes, tout cela s’effondre. Le fin mot de l’affaire, c’est chez Duns Scot, semble-t-il, que nous le trouvons plus tard. Certes, Duns Scot eut une compréhension subtile et approfondie des thèses avicenniennes; sa métaphysique du singulier en est une géniale mise en œuvre. Mais il reste que Duns Scot rejette, lui aussi, l’idée de l’Intelligence agente comme substance séparée, divine et immatérielle. En outre, il entre en conflit avec Avicenne sur la question de savoir si l’homme a, comme le professe Avicenne, une capacité naturelle de connaître sa fin dernière et le moyen de l’atteindre. Et là, Duns Scot estime qu’Avicenne a mélangé sa religion, qui était l’islam, avec les choses de la philosophie. La remarque est si pertinente que sa portée va beaucoup plus loin que ne l’envisageait sans doute Duns Scot.

Pas de rupture entre l’homme et l’ange
C’est qu’en effet la notion coranique de “nature” autorisait Avicenne à professer cette doctrine. La fitra , c’est la nature foncière et originelle de l’homme, telle qu’elle est éclose du mystérieux pacte préexistentiel avec l’Unique; une telle origine fait aussi bien de cette nature une “surnature”. Et partant aussi, il n’y a pas entre nécessité et liberté divine, entre le savoir et le croire, entre philosophie et théologie, le rapport antithétique que la conscience occidentale a l’habitude de formuler. Philosophie et théologie se conjuguent finalement en une sagesse divine, une theosophia , une connaissance qui est salut, “gnose”. Aucun de nos penseurs n’est gêné pour citer un verset coranique en exposant un problème philosophique. Quelle crainte, au fond, l’avicennisme inspirait-il aux docteurs de la scolastique latine? Sans doute une certaine conception de l’homme solidaire de l’angélologie. L’Intelligence agente est, chez Avicenne, une Intelligence séparée c’est-à-dire transcendante; elle est à la fois l’Ange de la connaissance pour les philosophes et l’Ange de la révélation pour les prophètes: elle est à la source d’une “philosophie prophétique” (hikmat nabawiya) où se conjoignent philosophie et théologie. Chaque individualité humaine pensante, entrant en conjonction avec elle, entre par elle en relation directe et immédiate avec le Plérôme céleste et reçoit d’elle sa capacité d’immortalité. Tout cela ne laissait pas beaucoup de place au magistère ecclésiastique. Mais précisément il n’y a pas de magistère ecclésiastique en Islam. Saint Thomas accorde à chaque individu un intellect agent, mais non “séparé”; du même coup est brisée la relation que l’individu en tant que tel entretenait par l’Ange de la révélation avec le Plérôme céleste. L’autorité du magistère se substitue à la norme personnelle de Hayy ibn Yaqzan. Au lieu que la norme religieuse, parce qu’initiation individuelle, signifiât liberté, c’est désormais contre elle, parce que socialisée, que se dresseront les insurrections de l’esprit et de l’âme. Mais, lorsque ces insurrections n’auront abouti qu’à substituer au magistère “sacral” un magistère laïcisé, ce ne sera que l’avènement d’une res religiosa désacralisée, comportant une norme collective non moins impérieuse. Les admirables pages qu’Avicenne a écrites sur l’état de liberté spirituelle (après avoir évoqué, dans les Isharat , le cas de Salaman et Absal) sont d’une grande portée. Il y a enfin ceci: l’angélologie est le second des cinq articles de foi en Islam (l’Unité divine, les Anges, la mission des prophètes, les Livres révélés, la Résurrection). L’angélologie avicennienne se trouvait d’emblée en Islam dans une position autre qu’en chrétienté. L’idée avicennienne de l’Intelligence, le Nouv néo-platonicien, eût été encore compatible avec la christologie d’Arius (ou toute autre christologie du type que les historiens des dogmes désignent comme celui de “Christos-Angelos”). Elle ne l’était pas avec le dogme officiel des conciles, dont était solidaire l’autorité du magistère. En revanche, en Islam, l’idée avicennienne de l’Intelligence, assimilée par les différentes écoles ésotériques, apparaîtra comme la sauvegarde de la pureté du tawhid , de l’Unité divine transcendante. Elle recevra des désignations multiples, mais sera postulée par la théologie apophatique (tansih ) comme la Figure qui permet au penseur croyant d’éviter à la fois l’anthropomorphisme (tashbih ) et l’agnosticisme (ta‘til ). Les résonances de l’avicennisme et de l’antiavicennisme se propagent jusque dans le monde moderne; toute “analyse spectrale” de la conscience occidentale aurait à en tenir compte. Les raisons et les conséquences de la crue de l’averroïsme, évoluant en averroïsme politique (Jean de Jandun, Marsile de Padoue, XIVe siècle) et submergeant finalement l’avicennisme, suggèrent que les noms d’Avicenne et d’Averroès pourraient être pris comme les symboles des destinées spirituelles respectives de l’Orient et de l’Occident.

La philosophie traditionnelle de l’Iran
De cette crue de l’averroïsme, en effet, il n’y a pas trace en Orient, nommément en Iran, pays qui, du XIIe siècle à nos jours, est resté le principal foyer de la philosophie en Islam. Le plus important continuateur immédiat d’Avicenne fut Bahmanyar Marzuban, dont le nom est d’une consonance iranienne préislamique. Ce qui succède à cette première école avicennienne, ce n’est ni la critique d’al-Ghazali, considérée comme mettant fin à toute entreprise philosophique, ni l’entreprise d’Averroès restaurant contre Avicenne le pur péripatétisme, mais l’œuvre de Sohrawardi, qui ressuscita la “philosophie orientale” de l’ancienne Perse, et l’influence de la théosophie d’Ibn ‘Arabi, très rapidement intégrée (ou réintégrée) à la gnose shi‘ite. L’œuvre d’Avicenne n’a cessé d’être enseignée et commentée en Iran jusqu’à nos jours. On a évoqué ci-dessus le monumental commentaire de Sayyed Ahmad ‘Alawi, élève de Mir Damad (1631) qui, de son côté, discute des doctrines d’Avicenne dans un grand ouvrage (les Qabasat ). Non moins considérable est le commentaire de Molla Sadra Shirazi (1640) sur le Shifa’ . Pour ne citer que quelques noms d’avicenniens ou avicennisants iraniens, mentionnons encore ‘Inayatollah Gilani, Mohammad Baqir Sabzavari (1680), Husayn Khwansari (1687), Muhammad Reza Qomsheyi (1889), Abul-Hasan Jilveh (1897), etc. Les professeurs ne disposaient pas de périodiques comme de nos jours pour notifier l’état de leurs recherches. On s’expliquait dans des “gloses”. C’est pourquoi la plupart de ces commentaires portent une empreinte très personnelle.

La coutume iranienne est de partager les philosophes en Mashsha‘un ou péripatéticiens, et Ishraqiyun , équivalent de platoniciens. À vrai dire, la frontière est souvent indécise; elle ne passe pas seulement entre les philosophes, mais parfois aussi à l’intérieur de chaque philosophe; elle est alors d’autant plus facile à franchir. Prenons le cas de Sadra Shirazi, maître à penser des philosophes iraniens traditionnels jusqu’à nos jours. C’est un avicennisant plutôt qu’un avicennien strictement dit, un avicennisant très proche de l’Ishraq de Sohrawardi; il est profondément imprégné des doctrines d’Ibn ‘Arabi, et c’est avant tout un penseur shi‘ite, ayant lui-même enseigné et commenté la gnose issue des traditions des Douze Imams. Il cite et commente Avicenne tout au long de ses œuvres, mais en toute indépendance. Ne retenons qu’un exemple, parce qu’il est capital; il provient de son commentaire sur la Théosophie orientale de Sohrawardi. Cet exemple, tout en référant à Avicenne, met en cause une des doctrines les plus caractéristiques de Sadra Shirazi, à savoir la thèse affirmant que la puissance imaginative est une faculté indépendante, comme l’intellect, de l’organisme physique, et apte par conséquent à survivre à celui-ci. Elle est le “corps subtil” de l’âme, cette enveloppe ou “véhicule” subtil, originel et impérissable que le néo-platonicien Proclos désignait sous le nom d’ohcma. De cette thèse dépend la réalité du monde “imaginal” (‘alam al-mithal ), intermédiaire entre le pur intelligible et le sensible. Et c’est à ce propos que Molla Sadra discute certaines pages d’un traité auquel Avicenne attachait beaucoup d’importance, parce qu’il le considérait comme un de ses traités ésotériques, la Risalat al-adhawiya . Avicenne y est amené à prendre position quant à la résurrection du corps, pour finalement en rejeter l’idée. Molla Sadra discerne avec clairvoyance que ce qui a manqué ici à Avicenne, c’est une doctrine satisfaisante de l’Imagination active et du monde imaginal, et partant une claire notion du corps subtil ou imaginal (jism mithali ). Avicenne semble rester prisonnier du dilemme, ne reconnaissant que le corps matériel ou l’esprit totalement immatériel. Traitant du devenir posthume immédiat de l’âme, il en est réduit à une accumulation de “comme si”, pour cerner quelque chose comme une “illusion imaginative” qui ne satisfait nullement le réalisme spirituel de Molla Sadra, lequel fait ensuite état, avec bonheur, d’autres pages d’Avicenne se rapprochant de sa propre thèse (le problème était le même que lorsqu’il s’agit d’expliquer le mi‘raj ou assomption nocturne du Prophète de ciel en ciel). Par leur affirmation de la corporéité subtile, de la “matière spirituelle” (maddat ruhaniya ), nos platoniciens de Perse rejoignent à leur insu le lexique des platoniciens de Cambridge, leurs contemporains. Il est significatif que récemment encore, un professeur éminemment représentatif de la philosophie traditionnelle en Iran, M. Sayyed Jalaloddin Ashitiyani, ait insisté tout particulièrement, dans des livres déjà nombreux, sur la transcendance (tajarrud ) de l’Imagination active et la réalité essentielle du monde imaginal.

Par cette lignée iranienne, c’est en milieu shi‘ite qu’a principalement continué de fructifier l’avicennisme. Sa doctrine de l’Intelligence, du Nouv, y a contribué à l’élaboration philosophique du concept de la “Réalité prophétique éternelle” (la Haqiqat muhammadiya ), dont l’Imam, au sens shi‘ite du mot, est la “dimension” ésotérique en laquelle se réalise l’Homme Parfait. L’identification de l’Ange de la révélation, qui est l’Esprit-Saint, avec l’Intelligence agente fonde une philosophie de l’Esprit demeurée fidèle à son inspiration eschatologique; elle tend essentiellement à une assomption transfiguratrice de l’homme, non pas à une incarnation évoluant en socialisation du divin. Mais faut-il rappeler de nouveau qu’il reste une masse de textes manuscrits à éditer? Les études avicenniennes ont encore longue carrière.
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